-3 700 / -2 900 : Période d'Uruk (Mésopotamie)
La chronologie de la période d'Uruk est très discutée et donc encore très imprécise. On sait qu'elle couvre une grande partie du IVème millénaire av. J.-C. Mais il n'y a pas d'accord sur la datation de ses débuts, de sa fin, et les grandes césures internes qu'il faut y distinguer. Cela est d'abord dû au fait que la stratigraphie d'origine, celle identifiée dans le quartier central d'Uruk, est ancienne, comporte des zones d'ombres, et ne répond pas forcément aux problématiques récentes du fait de l'ancienneté de ses fouilles (années 1930). Ensuite, ces problèmes sont en grande partie liés à la difficulté qu'éprouvent les spécialistes à établir des synchronismes entre les différents sites archéologiques, et donc à établir une chronologie relative des sites de la période qui permettrait de mettre au point une chronologie absolue plus fiable.
De ces agglomérations, c'est Uruk, site éponyme de la période, qui est le plus grand et de loin dans l'état actuel de nos connaissances, et surtout celui à partir duquel la séquence chronologique de la période a été bâtie. Il pourrait avoir couvert 230 à 500 hectares à son apogée durant l'Uruk récent, donc bien plus que les autres grands sites contemporains, et cette agglomération aurait pu regrouper de 25 000 à 50 000 habitants.
À cheval entre la préhistoire et l'histoire, la période d'Uruk peut être par bien des aspects considérée comme « révolutionnaire » et fondatrice. De nombreux phénomènes et innovations qui s'y produisent constituent un tournant dans l'histoire mésopotamienne et même plus largement dans l'histoire tout court, en particulier celle du monde occidental qui lui doit beaucoup. C'est de cette période que l'on date pèle-mêle l'apparition du tour de potier, de l'écriture, de la ville, de l'État. Il s'agit d'une nouvelle progression dans l'élaboration de sociétés étatiques, souvent qualifiées par les spécialistes comme étant « complexes » (en admettant que les sociétés antérieures aient été « simples »).
C'est dans le domaine de la culture céréalière que se produit un premier ensemble d'évolutions, puisque l'araire à soc en bois tractée par un animal (âne ou bœuf) apparaît vers la fin du IVème millénaire, permettant d'ouvrir de longs sillons dans la terre. Cela rend les travaux agricoles lors des semailles bien plus simples qu'auparavant, quand ce travail était fait uniquement à la main, avec des outils comme la houe. La moisson est facilitée depuis la période d'Obeid par la mise au point de faucilles en terre cuite.
L'époque d'Uruk voit également des évolutions importantes dans le domaine de l'élevage. C'est tout d'abord vers cette période que se produit la domestication définitive de l'âne, issu de l'hémione ou onagre sauvage. Il devient le premier équidé domestiqué dans cette région, et l'animal de bât privilégié du Moyen-Orient (le dromadaire n'étant domestiqué qu'au IIIe millénaire en Arabie). Avec sa capacité de transport élevée (au moins le double d'un humain), il permet le développement des échanges, sur courtes ou longues distances. L'élevage des animaux plus anciennement domestiqués (moutons, chèvres et bœufs) connaît également une évolution. Si auparavant ils étaient surtout élevés pour l'alimentation (viande, lait), ils le sont désormais de plus en plus pour les produits qu'ils fournissent (laine des moutons, poils des chèvres, peaux) et également pour leur force de travail. Ce dernier aspect concerne surtout les bovins, qui avec l'apparition de l'araire deviennent essentiels pour les travaux des champs, et l'âne qui prend une place majeure pour le transport de produits.
Une question épineuse dans le domaine des transports est de savoir si c'est bien de la période d'Uruk qu'il faut dater l'apparition de la roue. C'est en effet vers la fin de la période d'Uruk que l'on remarque que les sceaux-cylindres représentent de moins en moins de traîneaux, type de transport terrestre attelé qui est le plus représenté auparavant. Ils commencent à figurer les premiers véhicules qui semblent être sur roues, bien qu'on ne soit pas certain qu'ils figurent des roues. Mais il reste plus probable que la roue soit une invention réalisée entre l'Europe centrale et le Caucase, où ont été retrouvés ses plus anciens exemples. Il y a clairement des chariots en Mésopotamie du sud au début du IIIème millénaire. Les roues sont alors pleines.
Pour les transports à l'échelle locale et régionale en Basse Mésopotamie, les bateaux en roseau ou en bois sont cruciaux, en raison de l'importance des voies de communication fluviales et de leur capacité de port élevée
L'idée d'une apparition de l'État à la période d'Uruk, concomitante de l'apparition des premières villes est couramment admise dans les publications scientifiques mais connaît cependant quelques critiques, qui placent plutôt l'apparition de véritables États avec l'Empire d'Akkad, parlant seulement de « cités-États » (qui ne sont pas complètement des États) pour la période de l'Uruk récent. Quoi qu'il en soit, la mise en place de structures politiques étatiques est concomitante de nombreux autres phénomènes de la période, dont l'expansion de la culture urukéenne.
L'apparition d'institutions et de maisonnées ayant des activités économiques importantes implique la mise en place d'une gestion s'accompagne du développement des outils administratifs, et donc des outils de comptabilité. C'est une véritable « révolution managériale » qui se produit alors. Une classe de scribes se forme d'ailleurs dans la période de l'Uruk récent et contribue à la mise en place d'une sorte de bureaucratie, mais seulement dans le cadre des grands organismes. Plusieurs textes semblent attester l'existence d'une formation à la rédaction de textes de gestion pour les apprentis scribes, qui peuvent également utiliser les listes lexicales pour apprendre les signes de l'écriture. Il faut notamment administrer des entrepôts avec précision, en enregistrant les entrées et les sorties de produits – parfois dans le cadre d'achat et de ventes – pour avoir le compte exact de produits stockés dans le magasin dont le scribe avait la responsabilité. Ces espaces de stockage sont fermés et marqués avec le sceau de l'administrateur qui en a la charge. Il est intéressant de connaître et gérer l'état, l'exploitation et les capacités de production des champs, des troupeaux et des ateliers, et ce sur plusieurs années, ce qui implique la rédaction d'inventaires, et entraîne la constitution de véritables fonds d'archives de gestion de l'organisme ou d'un de ses bureaux. Cela fut possible avec le développement progressif de plusieurs outils facilitant la gestion, en dernier lieu l'écriture.
SOURCE : Wikipedia